Dans la communauté rurale d’Isahafa, dans la commune d’Anosy Avaratra, région d’Analamanga, l’agriculture n’est pas seulement un moyen de subsistance, c’est un mode de vie profondément enraciné, transmis de génération en génération. Mais aujourd’hui, ce mode de vie est menacé. Sans le consentement de la communauté, des individus puissants ont commencé à délimiter des terres que les familles locales cultivent et occupent depuis des décennies. Mais les agriculteurs ne baissent pas les bras et espèrent obtenir justice.
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« Des agriculteurs brandissant des pancartes indiquant : ‘Nous, la communauté, n’acceptons pas l’accaparement des terres à Isahafa.’ » |
Les agriculteurs d’Isahafa ne restent pas les bras croisés. Ils ont déjà entamé les démarches officielles de revendication foncière sous le mandat du maire, avant 2025, affirmant leur droit de continuer à cultiver les terres qu’ils exploitent depuis des décennies. Bien que les terres soient officiellement propriétés de l’État, elles sont aujourd’hui menacées par des individus privés qui en revendiquent la propriété — en s’appuyant sur des documents que les membres de la communauté estiment être frauduleux. Les habitants affirment que l’affaire pourrait impliquer des falsifications et l’usage de faux, ce qui constitue un délit selon le Code pénal malgache, notamment les articles 167 et 169 qui répriment les faux en écriture publique ou administrative.
Tentatives précédentes d’accaparement des terres
Ce n’est pas la première fois qu’Isahafa fait face à ce genre de tentative. Dans un cas précédent, une manœuvre similaire avait échoué lorsque la justice avait tranché en faveur des agriculteurs. La communauté reste marquée par le souvenir d’un scandale de vol de terres survenu il y a quelques années, lorsque les auteurs avaient finalement été arrêtés et emprisonnés après une forte mobilisation publique et une action en justice. Aujourd’hui, avec de nouvelles revendications en cours, les habitants craignent que, sans une action rapide et transparente des autorités, l’histoire ne se répète.
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Une autre pancarte indique : « Nous nous opposons à toute pression qui menace les droits des agriculteurs. » |
Témoignages
Voici les témoignages d’agriculteurs anonymes, dont beaucoup vivent aujourd’hui sous la menace de l’expropriation. Ils préfèrent rester anonymes pour éviter toute représaille ou conflit avec les prétendants à la terre.
« Ce n’est pas juste un conflit foncier, c’est une question de justice », affirme un militant local anonyme pour les droits fonciers. « Nous avons déjà vu ces tactiques. Les communautés sont intimidées, de faux papiers sont utilisés, et les procédures légales sont contournées. Les habitants d’Isahafa réclament un processus équitable et de la transparence.»
« Nous cultivons cette terre depuis avant ma naissance. Mon père a défriché ces champs, et aujourd’hui, j’y fais pousser du manioc et des légumes pour nourrir ma famille et vendre au marché. Nous n’aurions jamais imaginé qu’on nous l’enlèverait. S’ils prennent cela, où irons-nous ? Comment vivrons-nous ? »
« Mais maintenant, des gens arrivent en disant que cette terre ne nous appartient pas vraiment. Ils viennent avec des géomètres, ils placent des bornes, ils utilisent des mots juridiques que nous ne comprenons pas. Ils disent qu’ils ont des ‘papiers’. Mais qu’en est-il de notre histoire ici ? Et de nos droits ? »
Une tension croissante
À Isahafa, l’arrivée des géomètres et l’installation de bornes ont suscité une vive inquiétude. Bien que la terre soit encore utilisée par la communauté locale, le bornage laisse penser qu’une revendication juridique est en préparation, menée par des individus dotés de pouvoir politique ou financier. De telles manœuvres ne sont pas nouvelles : dans les zones rurales, elles annoncent souvent des saisies foncières formelles, réalisées sans transparence, ni dialogue, ni compensation.
Une question de droits et de reconnaissance
Cette situation soulève des questions urgentes sur les droits fonciers. Qui a l’autorité pour revendiquer la propriété ? Les personnes qui vivent et cultivent cette terre depuis des générations bénéficient-elles d’une protection juridique ? Dans de nombreux cas, les communautés ne disposent pas de titres fonciers officiels malgré leur occupation ancienne et leur gestion durable.
Le droit à la terre ne se résume pas à des documents, c’est une question de dignité, de survie et de justice. Quand une délimitation est faite sans consultation communautaire, cela compromet ces droits fondamentaux.
Ce que demandent les habitants d’Isahafa
Les habitants d’Isahafa ne demandent pas la charité, ils demandent la justice. Les signes avant-coureurs d’un accaparement des terres sont déjà visibles, et si rien n’est fait rapidement, ces communautés risquent de perdre plus que leurs terres : ils risquent de perdre leur voix et leur avenir.
Le moment d’agir, c’est maintenant, avant que les frontières ne deviennent des barrières.